L’espoir d’un rebond

La baisse de l’inflation, déjà entamée, devrait rassurer les Français et les pousser à consommer. Une bonne nouvelle après une année 2023 en demi-teinte.

Fin 2022, entre le Covid, le dévissage de l’euro face au dollar, l’explosion du coût du fret, les ruptures d’approvisionnement, l’accumulation des stocks, les responsables des marques ont vraiment eu l’impression d’aller de crise en crise. L’année 2023 n’aura effectivement pas été facile. Le marché du jardin, 8 milliards d’euros environ, a vécu une période contrastée. Il a globalement stagné en valeur, mais baissé de 5,5 % en volume. La baisse de la demande se confirme donc. Le niveau des stocks demeure important et ils ont été achetés à un prix élevé. Il faudra bien les écouler, même si l’inflation dans ce cas aura un effet positif.

Les explications des résultats contrastés de 2023 sont multiples. Au printemps, la météo n’a pas aidé les ventes. Un retard qui n’a pas pu être rattrapé. De plus, les conditions climatiques n’ont pas favorisé les ventes en été, en raison des arrêtés sécheresses. L’automne, chaud puis pluvieux, n’a pas fait mieux. Autre phénomène marquant de 2023 : l’inflation. Cette augmentation des prix a été renforcée par la montée en gamme des achats d’une partie des consommateurs. Les résultats ne sont cependant pas si mauvais. Les professionnels estiment que les chiffres de vente restent supérieurs à ceux de 2019. L’engouement né pendant le Covid n’a donc pas disparu. Les professionnels du jardin notent par ailleurs l’arrivée de nouveaux acteurs, comme le hard discount qui prend des parts de marché à un moment où les consommateurs sont attentifs aux prix et aux promotions.

Quelques gagnants

Certains secteurs ont mieux tiré leur épingle du jeu que d’autres. « Le jardin motorisé a fait une belle année, nuance Guillaume Mulleret, de l’agence GFK. Le marché des tondeuses croît de plus de 2%, le reste de la motoculture, c’est-à-dire coupe-bordures, taille-haies, tronçonneuses, etc., affiche un léger repli de 1%. Les produits pour jardin (supports de culture, produits phytosanitaire, engrais) progressent aussi de près de 2% en valeur, malgré une baisse des volumes. Le secteur des graines reste positif avec une hausse de 0,3% en valeur. Les semences florales et potagères compensant la baisse du gazon. » 
Des chiffres qui peuvent faire rêver certains secteurs du jardin comme l’outillage à main en repli de 10 %.

L’horizon 2024 s’éclaircit cependant, d’autant qu’il n’y a pas d’élections majeures cette année. L’inflation devrait se réduire selon les économistes. La banque centrale européenne table sur une hausse des prix de 3,2 % en 2024 et de 2,1 % en 2025. Un atterrissage en douceur… « Cela devrait permettre de rééquilibrer le volume et la valeur, estime Guillaume Mulleret, ce qui est tout de même important. L’an prochain, nous devrions assister à un retour des circuits spécialistes, si la météo est correcte, avec un volume légèrement à la hausse. Mais il faut faire attention : les facteurs macro-économiques influent de manière parfois totalement inattendus sur le marché du jardin. Nous sommes sur du faire soi-même ! Je pense que la demande sur les consommables devrait se stabiliser. Je garde néanmoins des interrogations concernant le matériel. Cela risque d’être plus difficile sur ce marché : le taux d’équipement a beaucoup augmenté depuis la crise. Et les jardiniers ne renouvellent pas leur matériel tous les 3 ans. »

Un avenir en suspens

Au final, l’économie, malgré les incertitudes, a plié, mais n’a pas rompu. Les conflits restent pour l’instant contenus mais laissent planer des interrogations. Les professionnels affichent une certaine confiance car ils arrivent avec des solutions qui répondent aux attentes des jardiniers, notamment environnementales. Reste une dernière donnée. La France demeure l’un des pays où les ménages épargnent le plus. Les bas de laine d’une partie de la population se sont bien remplis. L’épargne, c’est l’argent pour demain.Pour peu que les perspectives économiques soient rassurantes, les Français pourraient diminuer leur effort d’épargne et recommencer à consommer. Les économistes notent aussi que nous avons vécu 30 ans sans inflation : les consommateurs ont perdu leurs repères en matière de prix, ce qui peut expliquer leur frilosité face à la dépense. Un frein psychologique et une incompréhension de la justesse des tarifs qu’il va falloir surmonter.

Par David Fouillé